Les juristes engagé.e.s | La force de parler de vos projets autour de vous
Nougatine de Nevers #1
Hello !
Voici la première ! C'est super stimulant d'attaquer cette newsletter, j'ai beaucoup d'enthousiasme à l'idée de vous proposer mon analyse, des ressources et d'avoir vos retours.
Cette semaine, je vous partage :
Les juristes engagé.e.s
La force de parler de vos projets autour de vous
Le musée d'Alice
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For international people or courageous English-language learner : English Nougatine #1
⚖️ Les juristes engagé.e.s
Aujourd'hui j'ai envie de vous parler des juristes engagées.
Le rôle des juristes est de lire les règles de droit, de les faire appliquer, de les dénoncer. Pour ce faire, le juriste se sert dans une drôle de boîte à outils avec dedans : des raisonnements par analogie, par déduction, du jargon, des syllogismes, des qualifications juridiques de faits.
Un juriste engagé c'est quelqu'un qui met ce savoir-faire au service d'une cause qui lui tient à cœur. Chaque juriste peut avoir sa cause et c'est généralement le résultat d'une impulsion très personnelle. Leurs mouvements, leurs causes, leurs moyens d'actions sont très inspirants.
Car les juristes engagé.e.s ont à mon sens deux rôles extraordinaires.
Des passeurs de la norme sociale à la norme juridique
Parfois la norme sociale, disons le courant qui circule dans la société, précède la règle juridique. Par exemple, en 2013 est légalisé le "mariage pour tous". C'est un bel exemple de cas où la norme sociale s'était positionnée en premier en faveur d'un changement, d'un accroissement de liberté. Cette impulsion sociale s'est concrétisée par une norme juridique. Ce n'est pas toujours dans ce sens que s'opère le changement. Par exemple la réduction de limitation de vitesse sur les routes est actée par la norme juridique mais loin d'être soutenue par la norme sociale.
J'ai l'intuition que le juriste joue un rôle fondamental : celui de passeur de la norme sociale à la norme juridique. Est-ce que tu connais le fameux procès du viol mené par Gisèle Halimi en 1978? En bref, deux touristes belges sont agressées, violentées et violées par trois hommes, elles portent plainte. L'avocate Gisèle Halimi assume complètement son intention de ne pas seulement réparer le dommage subi par les deux victimes, mais entreprendre un grand procès symbolique. Elle interroge dans Une Farouche Liberté : "Comment isoler un procès de son contexte : la culture et la politique d’un pays ? Et pourquoi renoncer à secouer l’opinion et à changer les mœurs?" Elle ajoute "Alors oui, j’ai voulu un procès-débat. Un procès-tribune. Un « procès-spectacle » comme diront certains".
Ce procès a soutenu une norme sociale qui visait non seulement à reconnaître le viol comme un crime mais également à en donner une définition plus large, à alléger les stigmates qui pèsent sur ses victimes. Cette affaire fera jurisprudence et conduira deux ans après à réviser la loi pour faire du viol un crime puni de 15 ans de réclusion criminelle, ainsi qu'à élargir la définition du viol à tout acte de pénétration. Avant cela, les viols étaient systématiquement correctionnalisés, sauf s'ils étaient suivis du meurtre de la victime
En ça, les juristes engagés créent le passage de l'implicite sociale à l'effectivité juridique.
C'est un exemple retentissant dans lequel l'action d'une juriste engagée a servi une cause, celle des femmes, qui leur confère plus droits, de sécurité et de liberté.
L'intention de Gisèle Halimi de médiatiser le procès est une technique pour convoquer l'opinion et la faire participer à la réflexion et à la transformation. A cette époque, elle avait fait "témoigner" des personnes savantes sur le sujet du viol, sur ce qu'il représente et sur l'avenir que la société française devait lui réserver. La médiatisation des débats, l'intervention de la presse pour soulever l'opinion publique et prendre son pouls a joué un rôle clef dans cette mutation.
Pont entre l'application juridique des décisions et les conséquences concrètes sur les justiciables
Les juristes engagées peuvent créer des ponts entre l'application des textes de lois et les conséquences réelles sur les justiciables. Parce que la loi peut parfois être incomplète, insuffisamment efficace, ou générer des situations difficiles.
Voici l'idée mise en œuvre par Marc Binnié. Ce greffier au Tribunal de Commerce de Saintes a mis en place une aide à destination des chefs d'entreprises en difficulté. Il s'est aperçu que les dirigeants d'entreprise mise en liquidation étaient en proie à de multiples difficultés en plus de la perte de leur entreprise (difficulté financière, déstructuration familiale) dont découlaient des souffrances psychologiques et morales. Ainsi il fonde en 2013 l'APESA France (Association d'aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aigüe). Cette association met en contact ces dirigeants avec un réseau de psychologues spécifiquement formés à ces cas. La particularité est la prise en charge très rapide.
Les tribunaux et professions judiciaires de province tels que je les connais sont en contact quotidien avec ces situations. De telles actions pour venir en aide aux personnes vulnérables permettent une application humaine et réaliste de la justice.
Et toi, connais-tu des juristes engagé.e.s? Quels engagements t'inspirent?
🔊 Parler de vos projets autour de vous
Parler de ses projets autour de soi, ça apporte énormément d'effets bénéfiques. Tous le monde, amis, conjoints, collègues, des gugus rencontrés dans la rue.
Je vois trois effets magiques :
De la graine
Parce qu'en fait quand tu parles de ton projet à quelqu'un, quand tu franchis ce pas, c'est que ce projet a déjà une existence significative dans ta tête. Pas les idées éphémères qui te traversent l'esprit une seule fois, non. La persistante, la malicieuse, l'ingénieuse, oui cette idée là qui s'est logée depuis plusieurs jours, mois, semaines sous ta tignasse (ou ce qui en reste). Quand ça fait plusieurs fois que tu y penses, que tu te dis "j'ai vraiment envie de faire de la percussion, c'est quelque chose qui me tient à cœur".
Et bien figure-toi que le fait de dire à un ami "je vais m'acheter une batterie", ça donne une naissance publique à ton projet, le secret est dévoilé. Donc c'est symptôme que pour toi il a de l'importance.
A la jeune pousse
Deuxième bénéfice : se créer un espèce d'engagement vis-à-vis de la personne. Après avoir fait ça, t'as clairement le risque que la personne débarque en disant "ça en est où ton projet de percu ?"
Et ça, ça met une petite pression. Une saine pression d'ailleurs. Parce qu'en vrai tu ne perds rien à à répondre que "non je l'ai pas fait, cette idée m'est sortie de la tête". La personne n'est pas fâchée, tu ne lui avais pas promis un truc de ouf (hormis un solo à toute berzingue).
Ce sentiment de "public commitment", j'en suis super fan. Comme un mécanisme psychique inconscient qui fait que dire à voix haute devant des personnes que vous allez faire quelque chose, créé une coercition magique, cet sorte d'engagement qui vous booste à le faire vraiment.
Jusqu'à la floraison
Troisième et dernier sortilège : le feedback. Il est quasiment automatique et fait un peu l'effet d'un crashtest, en moins douloureux. Tu veux courir "10 kilomètres en 45 minutes". Tu le dis. Et là, bim, un avis "c'est chaud, tu cours à peine à 10km/h".
Alors plusieurs choses,
ils peuvent te donner leur avis sur la réalisation de ton projet dans l'ensemble, "Super idée de reprendre la course !"
ils te donnent des conseils et des recommandations externes "j'ai un pote très sympa avec qui tu pourrais courir sur les quais".
Ton projet prend de l'ampleur. C'était une petite graine dans ton cerveau, tu l'as arrosée en l'exprimant à haute voix, ça en à fait une petite plante pour toi, et elle est en train de fleurir grâce aux recommandations et feedbacks des autres.
Tu vois comme c’est puissant ?!
Quelles sont ces idées auxquelles tu penses, et qui peuvent bientôt se transformer en super projets ?
🎨 Le musée d'Alice
J'ai pris cette photo à Berlin, sous un pont ferroviaire, c'est un street-art collage.
La rue est un musée. Et j'aime m'y promener. C'est plutôt la rue qui me promène. Je lâche mon imagination, et elle se remue toute agitée à chaque recoin. Un morceau d'architecture, une fraction d'affiche, un street-art soigné, c'est l'ébullition. J'aime les perspectives qu'offre la rue, un rayon de soleil qui s'est faufilé entre deux murets et trois branches d'arbres, créant des ombres impromptues.
S'émerveiller dans la rue et laisser l’esprit vagabonder dans cet édifice à ciel ouvert, un délice.
Merci à toi, vous êtes un peu plus de 50 à avoir souscrit, je suis honorée !
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